Des docteur·e·s de la finance 

Les médias rapportent chaque jour des nouvelles économiques de toute sorte : des entreprises innovantes, des ventes d’actions et, actuellement, l’inflation sous tous ses angles. L’Association coopérative d’économie familiale (ACEF) de la Péninsule baigne dans le milieu depuis 31 ans. Sa directrice générale, Elaine Guilbault, connait bien les enjeux auxquels font face les usager·ère·s.  

« Notre mission de base est d’assurer la défense des intérêts du consommateur. On est aussi souvent interpellé par les gens parce qu’ils ont des problèmes financiers, parce qu’ils ont des enjeux budgétaires », explique la native de Métis-sur-Mer.  

Partout sur le territoire, de Matane aux Îles-de-la-Madeleine, chaque individu est reçu dans la situation où il se trouve, sans jugement, afin d’établir son portrait financier. « Les gens peuvent avoir tendance à se tourner vers les membres de leur famille pour parler de leur finance, mais ce ne sont pas nécessairement les mieux placés pour conseiller. »  

Les sept employé·e·s de l’ACEF ont un œil objectif sur la situation financière du ménage. D’ailleurs, Elaine Guilbault considère son équipe comme des docteur·e·s de la finance. « Ce ne sont pas toujours de bonnes nouvelles que l’on annonce, mais une fois la pilule passée, on peut établir des pistes de solutions en fonction de la réalité de la personne. » 

La directrice générale considère ainsi d’autant plus important d’employer du personnel ayant vécu le terrain. Anciennes ambulancière, infirmière ou intervenante en toxicomanie, le personnel de l’ACEF souhaitent être au cœur de la vie des bénéficiaires. « Et on s’entend que le domaine financier est plus qu’au centre de la vie des gens », insiste Elaine Guilbault.  

Collaboration communautaire 

La directrice générale provient du milieu coopératif qui lui permet de réaliser à quel point la solidarité dans le milieu communautaire est primordiale. On peut avoir le meilleur budget au monde, de nombreuses situations peuvent tout de même impacter notre santé financière.  

Pour l’ACEF, travailler avec d’autres organismes devient alors essentiel pour constituer un filet de sécurité. « On laisse les expertises qui appartiennent à chacun », explique la directrice générale.  

Les personnes avec des problèmes de toxicomanie ou en situation d’insécurité alimentaire, par exemple, se verront dirigées aux endroits appropriés. « Un filet, on ne peut pas le tenir tout seul. Parfois, il faut être cinq pour le tenir pour être sûr que la personne ne tombe pas à l’eau. » 

Enjeux de société 

Elaine Guilbault précise tout de même que « le but est de travailler en prévention pour éviter la réaction », comme l’est l’intervention budgétaire. Le volet de formation est ainsi crucial à l’ACEF de la Péninsule pour améliorer la littératie financière de la population.  

La littératie financière, c’est lorsqu’une personne détient assez de connaissances pour se sentir en confiance dans la prise de décisions dans la gestion de ses finances, ou d’être en mesure de poser les bonnes questions aux bonnes personnes.  

Une faible littératie financière peut donc fragiliser des personnes vulnérables, comme les personnes aînées. Avec tous les bouleversements économiques des dernières années et le coût de biens essentiels en hausse, « certaines doivent maintenant réfléchir si elles paient leur logement, leur épicerie ou leurs médicaments », raconte la directrice de l’ACEF. 

Cette situation touche également des personnes salariées, de plus en plus présentes dans les banques alimentaires. Selon Elaine Guilbault, la pandémie aura permis aux gens d’être plus ouverts d’esprit face à l’insécurité alimentaire. « Il y a moins de gêne, moins de honte à aller dans les moissons qu’auparavant. » 

Si elle constate qu’il peut être complexe pour un·e salarié·e de trouver ce qui est nécessaire pour lui en raison de la variété de fonctionnements des cuisines collectives et des moissons, Elaine Guilbault voit aussi plusieurs organismes démarrer de nouvelles initiatives.  

« À l’ACEF, on a ouvert un frigo à partager. Tu n’as rien à manger ce soir? Pars au moins avec un petit quelque chose. » Une preuve de plus que le communautaire est un réseau connecté pour ne laisser personne derrière.