Un homme heureux malgré la maladie
Gabriel-Marc Rouleau n’a pas gagné à la loterie de la vie. Des problèmes de dépendance à l’alcool et aux drogues et un diagnostic de schizophrénie au début de l’âge adulte ont créé le vide autour de lui. Malgré les embûches, le Matanais n’a jamais baissé les bras et il est allé chercher de l’aide au Centre alternatif en santé mentale et sociale Le Marigot, un organisme soutenu par Centraide Bas-Saint-Laurent. Il nous raconte avec courage son parcours de vie.
Issu d’une famille unie à Matane, Gabriel-Marc est l’aîné de trois garçons. C’est à l’aube de l’âge adulte que les choses commencent à mal aller. À 18 ans, il consomme drogue et alcool de façon abusive. « Je consommais pour faire comme les autres, je cherchais des buzz. » Plus il consomme, plus ses amitiés commencent à s’effriter. « J’ai tout perdu mes bons amis et j’ai gardé les mauvais. »
Au fil des ans, il s’enfonce dans la drogue et l’alcool. À 22 ans, il retourne vivre chez ses parents et décide de suivre une cure de désintoxication. « Je pleurais sans arrêt et un jour ma mère m’a conseillé de consulter un psychologue, mais il y avait six mois d’attente. » Finalement, c’est auprès d’un psychiatre qu’il obtient de l’aide. C’est à ce moment que le diagnostic tombe. « Il m’a dit que je souffrais de schizophrénie. Je l’acceptais très mal au début puisque c’est une maladie grave et que je devais prendre des médicaments toute ma vie. » D’autres membres de sa famille en sont atteints, sa grand-mère et deux de ses oncles.
Malheureusement, la maladie a fait des ravages dans sa vie personnelle, puisqu’il a perdu tous ses amis avant de comprendre qu’il souffrait de schizophrénie. Et avant de trouver le bon médicament, il a dû être hospitalisé à cinq reprises à Québec et Rimouski pour de graves psychoses, des moments très éprouvants pour lui. « Pour le moral, c’est dur d’être interné avec des gens qui sont tous malades et qui ne peuvent t’aider. C’était très difficile pour moi. »
L’aide du Marigot
À bout de souffle et sans réseau, mis à part sa famille, Gabriel-Marc va chercher de l’aide au Centre alternatif en santé mentale et sociale Le Marigot de Matane. L’organisme soutenu par Centraide Bas-Saint-Laurent offre un milieu de vie aux adultes qui vivent des problèmes de santé mentale. C’est à partir de ce moment qu’il prend du mieux, qu’il se fait des amis et que l’espoir de jours meilleurs renaît. « Je me suis inscrit à la chorale du Marigot, j’adore ça, c’est bon pour l’âme, c’est une activité agréable où je peux me dépasser. Quand je réussis, je suis très fier de moi. »
Depuis treize ans, Gabriel-Marc fréquente le centre une à deux fois par semaine pour ses pratiques avec la chorale et pour participer à toutes sortes d’activités, épluchettes de blé d’Inde, sortie cinéma, fêtes thématiques. Bien plus qu’un désennui, l’organisme l’aide à s’accepter tel qu’il est. « J’ai réussi à accepter ma maladie, je n’ai plus peur de parler de moi aux autres ou d’être jugé. »
En fréquentant l’organisme, Gabriel-Marc a repris confiance en lui. Il s’est même trouvé un emploi à temps partiel malgré ses limitations au travail. Car en plus de souffrir de schizophrénie, il est aussi atteint de dystonie tardive, une maladie qui occasionne des contractions musculaires involontaires. L’entreprise Les Ateliers Léopold Desrosiers lui a offert sa chance pour de menus travaux d’emballage de bois.
Des rêves à réaliser
Quand on lui demande s’il a des rêves, Gabriel-Marc garde les deux pieds sur terre, pas très loin de sa maladie. Il souhaite que ses médicaments continuent de le tenir loin des psychoses et des hospitalisations. Les jours où ça va mieux, il se permet de rêver à faire un voyage en Inde, un pays magique qu’il a déjà visité dans sa jeune vingtaine.
À 38 ans, il aimerait aussi trouver l’amour à nouveau, même s’il a fait un trait sur son envie de fonder une famille. « Je me suis fait faire une vasectomie pour être certain que ma maladie va mourir en même temps que moi. Je n’aimerais pas savoir qu’un de mes enfants est schizophrène. » Par cette simple phrase, on comprend l’ampleur de ce qu’il vit chaque jour. Mais ça ne l’empêche pas de faire son petit bonhomme de chemin et d’affirmer haut et fort qu’il est un homme heureux, malgré sa maladie.